Dans le pays Chopi, dans le sud du Mozambique et dans la zone des Masena, dans la région de Gorongoza au centre du Mozambique, on joue de ce formidable et long timbila, varimba, termes locaux pour ces grands balafons dont le son profond et les vibrations grésillantes amplifiées par des calebasses m'émeuvent. Les calebasses servent de caisses de résonance. Elles sont de tailles différentes, des basses aux aigus, et trouées. L'orifice pratiqué sur le côté, à la base de la calebasse, est obstrué par une feuille de papier fin collé par une pâte de farine de maïs mélangée à de l'eau. L'extrémité des baguettes est garnie d'un morceau de caoutchouc, de pneu découpé en rondelle. Les lames de bois de taille et d'épaisseur différentes sont en bois d'"umbila".

Le varimba est étranger aux zones où je résidai, même s'il est fortement apprécié. Le varimba est accompagné de percussions, d'habitude un gros tambour et de nombreuses congas qui soutiennent le rythme. Ces congas sont faites de boîtes de conserves remplies de cailloux et percées d'un court manche de bois. Le varimba se joue et se danse. Le groupe de varimba ne peut dissocier les joueurs (de un à quatre, toujours masculins, je n'ai jamais vu de femmes en jouer), des danseurs, hommes et femmes.


Varimba. Extrait du Groupe de Domingos enregistré au cours d'une fête à Chimoio.



Une danseuse faisant partie du groupe mène son corps par la danse dans un état de transe. Chimoio 1998.

A Chimoio, je rencontrai un personnage appelé Domingos qui joue du varimba avec des amis. Ils sont originaires de Sena sur le fleuve Zambèze, à la limite entre la province de Manica et de Sofala.. Domingos vit dans un quartier périphérique de la ville de Chimoio. Domingos n'est pas seulement chef et animateur du groupe de varimba. L'instrument lui appartient, c'est lui qui les fabrique. Domingos est aussi curandeiro (guérisseur).

Il dit que son varimba est un instrument de cure. Son esprit personnel s'exprime par le varimba. "Quand je joue toute la nuit, à la fin, mon esprit sort". Domingos ne boit pas: "Mon esprit ne se combine pas avec l'alcool".

Il a émigré au Zimbabwe pendant la guerre (comme Garikai) , il s'est fait une carrière là-bas en tant que footballeur, mais surtout ce qu'il appelle 'entraîneur". Il vendait ses services de curandeiro pour faciliter les victoires des clubs qui l'employaient.

Domingos poursuit plusieurs activités: Il veut établir une aire de danse clôturée dans un quartier périphérique de Chimoio, où chaque week-end, il pourrait jouer , faire payer une modique entrée et vendre de la bière de céréales.

Il est membre de l'AMETRAMO (Association des Médecins traditionnels Mozambicaine) provinciale au service de laquelle il perçoit les quotes-parts des curandeiros de la ville. Il les informe aussi des tarifs établis par l'association qu'ils se doivent de respecter.


Prise. Le meneur et un joueur.

Toute séance de varimba doit mener à la transe. Au cours de la transe un esprit s'exprime à travers le corps de celui qui est pris.

La musique, le rythme, les chants, la danse et le groupe sont indissociables d'une technique du corps, souvent combinée à l'alcool, soit la bière de céréales, soit de l'alcool distillé à partir de son de maïs et de sucre, la nipa. L'altération de l'état de conscience par ces techniques permet la communication avec les esprits. Cette communication est curative. On y cherche les causes et les solutions aux troubles corporels et psychologiques. La cure est ainsi associée à une manipulation délibérée du corps. Ces manipulations s'accompagnent de dérision, de joie, de grossiereté; dans ces performances, les corps évoquent continuellement la sexualité, comme dans les rites de fécondité de la terre


Mozambique
Une séance de varimba dans un quartier populaire de Chimoio. Le groupe se compose de quatre joueurs, d'une joueuse de tambour, d'un meneur, de danseurs et de danseuses. Ici le but est de faire danser les gens du quartier et de recevoir quelques pièces.
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